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Les modillons, expression de l’imaginaire

Les modillons, expression de l’imaginaire

La première question que vous vous êtes posé en lisant ce titre, c’est vraisemblablement « C’est quoi un modillon ? ». Ce terme désigne un élément d’architecture servant à soutenir soit un soit, soit une corniche ou un balcon.

 

Bien que l’on puisse comparer le « modillon » à un « corbeau » (pierre utilisée pour supporter un élément en encorbellement ou un avant-corps), il faut toutefois reconnaître que des différences les caractérisent.

 

Les modillons apparaissent au début du XIIe siècle sur les églises romanes. Or l’église de Sainte-Foy de Sélestat est une église romane construite en 1087.

 

Elle fut érigée sur les ruines d’une église primitive édifiée par Hildegarde von Schlettstadt, une mécène allemande. A sa mort, en 1094, elle fut inhumée dans la crypte de l’église Sainte-Foy.

 

Les modillons romans constituent l’expression de la créativité et de la richesse des thèmes abordés. Les personnages et les scènes représentées font preuve de la naïveté et la gaucherie des tailleurs les ayant réalisés.

 

On y trouve des décors géométriques, des animaux, des monstres, dont les représentations sont même quelquefois à la limite de l’obscénité. Le style des modillons dénote en tous cas une grande liberté d’inspiration.

 

Pour nous autres, observateurs du XXIe siècle, ce qui intrigue, c’est la signification, voire la portée symbolique de ces évocations religieuses, éducatives et morales.

 

Mais en l’absence de sources écrites il faut reconnaître que l’interprétation est délicate.

 

Quelles étaient les sources auxquelles les bâtisseurs pouvaient trouver leur inspiration ? Ils connaissaient les textes sacrés de la Bible et étaient familiers des signes symboles et représentations qu’ils trouvaient dans les écrits anciens.

 

A partir de là, ils donnaient libre court à leur imagination pour inventer un univers peuplé de créatures mystérieuses et irréelles à partir du monde animal, humain ou végétal.

 

Par la même occasion ils se servaient de tout cela pour évoquer par l’image, les vertus et les vices des passions humaines et surtout frapper les esprits et enseigner les chrétiens. « L’important » disait Saint-Augustin, « est de méditer la signification d’un fait, et non d’en discuter l’authenticité ».

 

Pour parler de choses concrètes, je vous invite à vous rendre Place du Marché-aux-choux à Sélestat. En approchant de l’édifice, intéressez-vous aux arceaux sur lesquels repose la corniche grâce à de nombreux modillons.

 

Voyons quelques exemples sur la façade Sud.

 

 

 

 

 

Nous trouvons une sirène, un monstre de la mer avec une tête et une poitrine de femme, le reste corps étant celui d’un poisson.

 

Les sirènes avaient pour réputation de séduire  les navigateurs par leur beauté et la mélodie de leur chant pour ensuite les engloutir dans la mer. Il ne faut donc pas s’étonner que la sirène symbolise vraisemblablement la séduction et une sexualité débridé et les illusions de la passion.

 

 

Une figure de dragon apparaît également sur cette même façade.

 

A n’en pas douter, cette figure fait référence à Satan et à l’idolâtrie, mais elle pourrait également évoquer la victoire de la foi sur l’idolâtrie, la posture du monstre indiquerait dans ce cas qu’il est vaincu.

 

Nous trouvons également une tête de sanglier qui peut évoquer la lutte que doit mener l’homme pour maitriser ses vices et ses péchés. Le sanglier représente le danger immédiat qu’il faut combattre physiquement. Le fait qu’il cache ses yeux voudrait-il signifier qu’il ne veut pas voir le danger ?

 

A côté de cela on aperçoit un personnage qui verse de l’eau, ce qui pourrait faire référence au baptême. Là encore ce n’est qu’une hypothèse.

 

 

Il y a également un oiseau à longue queue, peut-être un paon qui en déployant ses plumes symboliserait l’orgueil. Mais selon la tradition chrétienne il pourrait aussi évoquer la roue solaire et dans ce cas être un signe d’immortalité, sa queue évoquant le ciel étoilé.

 

Il faut toujours se rappeler que le symbolisme lié à ces représentations, varie selon l’époque, le pays et la croyance d’où une difficulté supplémentaire lorsqu’on veut les interpréter !

 

Cela ne vous donne qu’un faible aperçu de la richesse architecturale dont sont dotés de nombreux édifices d’Alsace. A vous d’en découvrir d’autres lors de vos promenades.

 

 

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